Human Rights Watch dénonce une offensive mondiale et inédite de Pékin contre les droits humains

Publié le 15 janvier 2020 à 6h01
Human Rights Watch dénonce une offensive mondiale et inédite de Pékin contre les droits humains

CENSURE - A l'intérieur du pays, comme dans le reste du monde, la Chine use de son influence pour "museler les critiques", estime Human Rights Watch.

Comment faire taire toute critique du régime ? Selon Human Rights Watch, la Chine excellerait dans cet art avec une intensité inédite. "Le gouvernement chinois mène une intense offensive contre le système international de protection des droits humains", "la plus intense qu'on ait vue depuis l'émergence de ce système au milieu du XXe siècle", a martelé Kenneth Roth, directeur exécutif de l'ONG, lors de la présentation du rapport annuel depuis le siège de l'ONU à New York. Le premier secrétaire de la délégation chinoise à l'ONU, Xing Jisheng, qui assistait à la présentation, a balayé ces critiques, jugeant le rapport "plein de préjugés et d'inventions".    

Mais, selon Kenneth Roth, le parti communiste a bâti en Chine "un Etat policier orwellien high-tech et un système sophistiqué de censure d'internet pour surveiller et supprimer les critiques publiques", qui dénoncent notamment "le système cauchemardesque" de répression instauré contre les musulmans du Xinjiang.  Et à l'étranger, le gouvernement chinois "utilise son influence économique croissante pour museler les critiques", selon l'ONG.

Inaction voire complicité des autres pays

"Si d'autres gouvernements commettent des entorses graves aux droits humains, aucun autre gouvernement ne montre les muscles avec autant de vigueur et de détermination pour saper les normes internationales des droits humains et les institutions qui pourraient les soutenir", juge-t-elle.

Kenneth Roth avait espéré présenter ce rapport cinglant depuis Hong Kong. Mais "pour la première fois", a-t-il souligné mardi, il a été interdit d'entrée dans l'ex-colonie britannique, au prétexte que l'ONG y encourage le mouvement pro-démocratie qui l'agite depuis sept mois. "Le gouvernement chinois est terrifié d'admettre qu'il y a un désir authentique de démocratie sur un territoire qu'il gouverne, car s'ils admettaient que c'est un désir spontané plutôt qu'une idée imposée de l'étranger, alors ce qui se passe à Hong Kong pourrait s'étendre" à toute la Chine, selon Kenneth Roth.

Human Rights Watch dénonce l'inaction, voire la complicité d'autres pays face à cette "menace existentielle" que fait peser Pékin sur les droits humains, selon l'ONG. "Plusieurs gouvernements sur lesquels on pouvait compter pour que leur politique étrangère défende les droits humains au moins une partie du temps ont largement abandonné cette cause", a affirmé Kenneth Roth.

"Certains dirigeants comme le président américain Donald Trump, le Premier ministre indien Narendra Modi et le président brésilien Jair Bolsonaro brident le même ensemble de lois protégeant les droits humains que la Chine, galvanisant leur public en combattant les mondialistes qui osent suggérer que tous les gouvernements devraient respecter les mêmes normes." "Trump a perdu sa crédibilité, en donnant trop souvent l'accolade aux autocrates", a-t-il ajouté.

"Il faut des critiques publiques précises"

Il a aussi critiqué l'Union européenne, "occupée par le Brexit, handicapée par des Etats membres nationalistes et divisée sur les migrants".  HRW reproche notamment au président français Emmanuel Macron de "ne pas avoir mentionné publiquement les droits humains" lors de sa visite en Chine en novembre. Kenneth Roth a aussi vivement critiqué le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, accusé de ne parler de droits humains qu'en "termes génériques". "Il faut des critiques publiques précises", a souligné Kenneth Roth, "et il n'y en a pas assez émanant du secrétaire général". 

Kenneth Roth reproche notamment au patron de l'ONU - une enceinte dans laquelle Pékin "fait tout" pour éviter une discussion sur la situation au Xinjiang - de ne pas avoir "demandé publiquement que la Chine mette fin à l'emprisonnement massif de musulmans" au Xinjiang. Plus généralement, HRW accuse gouvernements, entreprises et universités de préférer se taire plutôt que de risquer de perdre l'accès à l'immense marché chinois. L'ONG cite notamment les récentes représailles de Pékin à un tweet de Daryl Morey, directeur général de l'équipe de basket des Houston Rockets, en soutien aux manifestants de Hong Kong.

Human Rights Watch appelle les démocraties à s'unir pour contrer les efforts anti-droits humains de Pékin, en gelant notamment les comptes bancaires à l'étranger de tous les responsables impliqués dans la répression au Xinjiang. L'ONG les appelle aussi à conditionner toute visite d'Etat de dirigeants chinois à "de véritables progrès en matière de droits humains".


La rédaction de TF1info

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